La Belgique des Belgettes
Dix étudiant.e.s en formation d’éducateur.trice spécialisé.e, en voie initiale ou en apprentissage ainsi qu’une étudiante en formation d’assistante de service social sont parties en Belgique début février 2022, accompagné.e.s par deux formatrices d’Askoria, à la découverte de ce qui se joue du côté de la participation des personnes concernées.
Retour en mots et en image sur ce voyage pas comme les autres…
A l’origine de ce projet : un questionnement sur l’importance de la participation des personnes concernées
“Dans le cadre de notre formation théorique, la participation des personnes concernées est un atout primordial dans notre professionnalisation. En effet, par le biais de questionnaires d’évaluation, les travailleurs sociaux en formation ont pu exprimer la pertinence et l’enrichissement qu’apportent les interventions des personnes accompagnées. Grâce à leurs différents témoignages, nous prenons conscience des réalités du terrain tout en portant un regard nouveau sur nos pratiques professionnelles pour répondre de manière plus juste à leurs besoins, leurs envies, etc…
A partir de ces constats, nous nous sommes questionné.e.s sur l’importance de la participation des personnes concernées dans la formation des travailleurs sociaux et plus particulièrement dans nos pratiques professionnelles. De ce fait, nous avons décidé de partir en voyage d’étude en Belgique afin de découvrir de nouvelles pratiques professionnelles mais aussi pour échanger avec différents acteurs locaux engagés dans cette approche.
Notre voyage d’étude s’est réalisé du 1er au 4 Février 2022 en Belgique. A travers ce récit, vous retrouverez une synthèse de nos différentes rencontres mais aussi des témoignages de certains étudiants ayant participé au projet.”
Jour 1 : 1er février 2022
Lors de notre premier jour à Mons, nous avons été accueilli.e.s à la Haute École en Hainaut, par deux formateurs et trois étudiants en formation d’assistant de service social. Nous avons échangé sur le sujet de la participation des personnes concernées dans la formation des travailleurs sociaux. Les étudiants belges nous ont expliqué avoir bénéficié d’interventions animées par des personnes concernées, parfois seules et d’autres fois accompagnées de professionnels. C’est le cas de l’intervention animée par le Théâtre du Copion, dont trois professionnelles nous ont rejoints au cours de notre échange avec les étudiants, afin notamment de nous partager leurs expériences et leurs pratiques concernant la participation des personnes concernées.
« Cette troupe de théâtre m’a particulièrement marquée. En effet, les professionnel.le.s de cette troupe mettent en avant la notion de participation et de co-construction des pièces de théâtre avec les personnes concernées. Elles participent à l’élaboration, la rédaction, la mise en scène et la mise en œuvre de spectacle théâtrale. Cette rencontre m’a permis d’obtenir des outils concrets concernant la notion de participation et de constater l’importance que cela peut avoir pour les personnes concernées et des impacts que cela peut avoir sur leur vie au quotidien. De plus, les pièces réalisées sont en lien avec des sujets de sensibilisation du grand public comme les violences conjugales, l’inceste… Ces pièces sont co-écrites avec les personnes accompagnées et elles sont créées à partir de récits et de témoignages de personnes concernées.
Ces pièces visent le grand public et après chaque représentation, un débat est réalisé pour échanger autour des émotions et réactions suscitées par ce spectacle. »
Margaux
Lors de cette journée, nous avons également rencontré une bénévole et le fondateur d’une maison de quartier nommée « la Rochelle ». Cette rencontre a été particulièrement bouleversante car le témoignage d’une personne accompagnée nous a permis de réellement constater le bénéfice de l’implication des personnes dans leur projet, leur vie et leur estime d’elle-même.
« La rencontre qui m’a le plus affectée a été ce témoignage. Cette personne accompagnée nous a partagé son parcours, son histoire, ses difficultés mais aussi son implication dans cette maison de quartier et comment cela lui a permis d’évoluer. Elle explique avoir gagner en confiance d’elle-même, en estime d’elle-même, réaliser des actes de la vie quotidienne qu’elle ne pensait pas pouvoir réaliser, acquis de nouvelles compétences comme l’empathie, le respect, la bienveillance et l’accueil des personnes qui viennent, pour la première fois, à la maison de quartier. Elle nous a expliqué l’impact positif qu’a eu la maison de quartier et a mis l’accent sur son implication, la place qu’elle a pu prendre au sein de cette maison et l’importance de l’inclure dans la prise de décision qui la concerne mais qui concerne aussi la maison de quartier. C’est un membre de l’association à part entière et cela renforce les capacités de la personne. »
Manon
Jour 2 : 2 février 2022
Après une première journée riche en rencontres et en découverte, nous avons eu la chance de rencontrer Pierre Schonbrodt, vidéaste et journaliste au Centre d’Action Laïque de Bruxelles. Cette association à but non lucratif, financée par l’État, défend et promeut la laïcité en Belgique francophone avec une mission d’éducation permanente et d’assistance morale des citoyens.
Pierre a réalisé un documentaire nommé “solde insuffisant” qui permet de donner la parole aux professionnels et aux personnes concernées en leur offrant la possibilité d’expliquer leur parcours, parfois complexifié par les lois, les devoirs et l’accès aux droits sociaux.
Nous avons longuement échangé sur le fait que malgré le contexte sanitaire, les exigences des services publiques sont restées les mêmes concernant l’accès au droit commun, alors que cette crise a aggravé des situations de précarité déjà existantes. Ces exigences sont même vécues comme très intrusives voire impossibles à respecter.
“J’ai trouvé intéressant de voir que l’État pouvait financer des reportages à destination de tous publics dans l’objectif de mettre en avant une réalité vécue par les personnes en situation de grande précarité. De plus, voir un vidéaste engagé dans cette cause permet de montrer que nous ne sommes pas seuls à porter ces observations, ces questionnements et ce désir de bien faire”.
Mathilde
Jour 3 : 3 février 2022
Les rencontres se sont multipliées et ont été plus intéressantes les unes que les autres. Lors de ce troisième jour, nous avons rencontré un coach de vie et une capteuse de logement. Ces professionnels exercent dans le Relais Social Namurois, à Namur. Cette association a pour objectif d’accompagner des personnes sans domicile fixe, en les accompagnant à trouver un logement répondant à leurs besoins et critères. A l’entrée dans le logement, l’accompagnement continue. En fonction du projet de la personne concernée, les professionnel.le.s peuvent par exemple l’accompagner dans le cadre de l’insertion professionnelle ou encore l’insertion sociale.
“Lors de cette rencontre, les professionnels nous ont expliqué qu’à l’entrée dans un logement du service, il n’y a pas de contrat spécifiant la durée de l’accompagnement. Un accompagnement peut donc durer des semaines, des mois ou des années. L’accompagnement prend fin dès lors que la personne concernée en nomme le souhait. Je pense qu’un accompagnement sans durée déterminée peut permettre la prise en compte de la temporalité de la personne accompagnée, et de fait, une pratique de faire avec par les professionnels.”
Ophélie
De plus, nous avons pu rencontrer le “Service de Cohésion et de Prestation Sociale” à Louvain-La-Neuve. Ce service est divisé en 3 plans :
- “La cohésion sociale” qui a pour objectif de mettre des actions en place sur une durée de 6 ans afin de permettre d’améliorer l’accès aux droits fondamentaux des personnes.
- “Le plan de stratégique et de subvention” qui a pour objectif de réaliser des actions éducatives et préventives tel que d’accompagner les jeunes sur l’insertion scolaire ou professionnelle, la connaissance de leurs droits et les prévenir sur les dangers des drogues…
- “le travail concernant la fracture numérique” qui accompagne des personnes ayant des difficultés en lien avec le numérique. Ces derniers peuvent être accompagnés, par exemple, pour la création d’un Curriculum Vitae sur un ordinateur, pour réaliser des demandes sur internet…
L’objectif prioritaire du service est d’autonomiser les personnes concernées pour que ça ne soit plus les travailleurs sociaux qui portent leurs paroles.
« Cette structure a un mode de fonctionnement basé sur la personne, ses envies et ses motivations. Les professionnels attachent de l’importance à la participation des personnes et vont co-construire avec elle leur projet. Ils partent du vécu, du parcours, des expériences de la personne pour aller vers ses objectifs. L’intérêt est de permettre à la personne de tenter des solutions par elle-même.”
Emma
En conclusion…
“Ce voyage nous a permis de découvrir de nouvelles pratiques, de nouvelles cultures et de nouvelles valeurs. Nous avons davantage pris conscience de l’importance de la participation des personnes concernées dans leur projet et dans les décisions qui les concerne. Nous avons également remis en question certaines de nos pratiques professionnelles et développé certaines valeurs professionnelles.
Les belges sont très accueillants et nous remercions une fois de plus tous nos interlocuteurs, qui nous ont permis de partager de nombreuses connaissances en d’en apprendre de nouvelles. Merci pour leur bienveillance, leurs bières et leurs friteries.”
Les Belgettes and Co
Pour aller plus loin
- la page Facebook des Belgettes
- leur intervention dans le cadre du colloque international du GIS HYBRIDA IS qui se déroulera du 18 au 20 mai 2022 sur le site d’Askoria Rennes : ici pour s’y inscrire !
- leurs coordonnées directes : ma.non22@hotmail.fr